18 septembre, 2014
Emouvante interview de Myriam Ibrahim, la jeune chrétienne Soudanaise qui a échappé à la pendaison
« La foi, c’est la vie. Si vous n’avez pas la foi, vous n’êtes pas vivant. »
Myriam Ibrahim, la jeune femme qui a échappé à une sentence de mort au Soudan où elle avait été condamnée pour apostasie et adultère, vit désormais aux Etats-Unis avec son mari, citoyen américain, et ses deux enfants. Sous la pression internationale, une cour d’appel soudanaise s’est vue contrainte de lever la condamnation.
Rappelons qu’en France, c’est Chrétienté-Solidarité, sous l’impulsion de Bernard Antony, qui a organisé une manifestation pour Myriam Ibrahim devant l’ambassade du Soudan, le 26 mai. La seule, semble-t-il.
Myriam Ibrahim a donné sa première interview à Megyn Kelly, de Fox News. L’entretien, diffusé le 15 septembre, est superbe et émouvant. Il est visible ici. Pour les non anglophones, je vous propose ici la traduction de leurs échanges. – J.S.
Pour voir la vidéo, cliquez ici. |
— Je suis heureuse d’être ici avec vous.
— Vous avez été incarcérée alors que vous étiez enceinte de plusieurs mois. Vous aviez déjà un petit garçon d’un peu plus d’un an au moment de votre emprisonnement en janvier 2014. À quoi pensiez-vous dans votre cellule de détenue ?
— La situation était difficile mais j’étais sûre que Dieu resterait à mes côtés. Je ne me suis appuyée que sur ma foi, sûre que Dieu serait là à n’importe quel moment et dans n’importe quelle situation.
— Il n’a fallu que six semaines pour qu’on vous déclare coupable d’apostasie et d’adultère. Vous ont-ils donné la possibilité de renoncer à votre foi chrétienne?
On m’a donné trois jours. En outre, des personnes de l’association des savants de l’islam sont venues me voir dans ma cellule. C’étaient des imams qui m’ont récité des sourates du Coran. Je faisais face à des pressions énormes.
— Mais vous avez refusé. Vous étiez enceinte, vous aviez un petit garçon d’un an qui était avec vous dans la cellule de prison : n’a-t-il pas été très difficile de rester fidèle à votre foi ?
— J’avais pour moi la confiance en Dieu : la foi était ma seule arme au cours de ces confrontations avec les imams, car c’est ce que je crois…
— Pourquoi n’avez-vous pas tout simplement dit ce qu’ils avaient envie d’entendre, pour sauver votre vie ?
— Si je l’avais fait, cela aurait été la même chose que de tout abandonner. Cela n’est pas possible parce que ce n’est pas vrai. C’est mon droit de suivre la religion de mon choix. Je ne suis pas la seule à avoir souffert d’une telle situation : il y a beaucoup de Myriam au Soudan et à travers le monde. Il n’y a pas que moi, je ne suis pas la seule.
— Pensiez-vous qu’ils vous tueraient ?
— La foi, c’est la vie. Si vous n’avez pas la foi, vous n’êtes pas vivant.
— Douze jours après que fut prononcé la sentence de mort, vous avez donné naissance à Maya, en prison. Dites-nous dans quelles conditions cela s’est passé.
— Maya est née dans des circonstances difficiles. Je devais accoucher à l’hôpital mais ma demande a été rejetée. A l’heure où je devais donner naissance ils ont refusé d’enlever les chaînes de mes chevilles et j’ai dû accoucher entravée. Ce fut difficile.
— Quel noir moment cela a dû être. Vous vous trouvez dans cette prison Soudanaise, vous tenez votre nouveau-né dans vos bras, votre petit garçon est là près de vous, vous savez que vous êtes condamnée à mort. Comment avez-vous réussi à faire face?
— C’était une situation très difficile mais j’avais ma foi en Dieu. Je savais qu’Il m’aiderait, qu’Il savait que j’étais victime d’une injustice. C’est mon droit de pratiquer la religion de mon choix.
— Comment voyez-vous ce que le gouvernement des États-Unis a fait pour vous?
— Au départ avant mon incarcération Daniel et moi sommes allés au consulat des États-Unis. Le consul a refusé de nous parler et d’entendre les détails de l’affaire. Cette femme a refusé de s’occuper de nous et nous a dit d’aller voir auprès des Nations unies. Cependant l’ambassadeur Jerry Lanier m’a soutenue et son soutien a vraiment changé ma vie.
— Finalement sous la pression internationale une cour d’appel vous a libérée. Quel effet vous a fait cette nouvelle?
— J’ai ri, j’ai pleuré, j’étais très heureuse.
— A l’aéroport ils ont essayé de vous empêcher de quitter le Soudan mais pour finir vous y êtes parvenue. Vous avez fait route pour l’Italie en compagnie du ministre délégué des affaires étrangères, qui à quelques minutes de l’atterrissage à Rome a envoyé un message : « Mission accomplie. » Puis vous avez rencontré le pape. Cela a du être surréaliste.
— J’étais très heureuse. Je n’ai aucun problème avec personne. Je n’ai commis aucun crime. La seule chose dont je sois coupable, c’est d’avoir voulu vivre ma vie conformément à mes choix.
— Avez-vous été triste de quitter le Soudan, malgré tout?
— Oui, cela était triste car c’est le pays où je suis née. Mon peuple, mes amis, mes voisins sont tous là-bas, et ma vie est profondément enracinée au Soudan. Malgré toutes les souffrances, et toutes les circonstances difficiles – on s’y habitue.
— Parlons de l’islam. Le Soudan est le théâtre régulier de persécutions envers les chrétiens. Elles n’ont rien d’inhabituel. 88 % des filles subissent des mutilations génitales. Quelle est selon vous la dangerosité de l’islam radical?
— Comme je l’ai dit, j’ai mis ma vie dans la balance pour les femmes du Soudan. J’étais très près d’elles et je ressentais leurs souffrances. J’ai partagé avec elles les conditions difficiles de la prison et de la vie en général. En ce qui concerne la situation des chrétiens, c’est un fait bien connu que leur vie est difficile, qu’ils sont persécutés, traités avec dureté. Ils ont peur de se dire chrétiens par crainte de la persécution. Parfois des chrétiens qui se trouvent en prison en raison de difficultés financières s’entendent dire que le gouvernement remboursera leurs dettes s’ils se convertissent à l’Islam. Je n’ai jamais été musulmane. J’ai toujours été chrétienne. Si vous êtes chrétien et que vous vous convertissez à l’islam, cela deviendra difficile de le quitter : si vous le faites vous encourrez la peine de mort.
— Vous vivez désormais aux États-Unis, dans le New Hampshire. Comment cela se passe-t-il?
— Pour l’instant je n’ai pas encore une vie stable. Mais c’est mieux que la prison.
— Merci ! (Rires). Avez-vous encore le sentiment d’être en danger ?
— Oui.
— Comment cela ?
— Parce que j’ai à l’esprit une image très vive de la situation au Soudan.
— Et comment vont vos enfants ici ?
— Mes enfants sont très heureux d’être avec leur père, ensemble, comme une famille.
— Comment voyez-vous l’avenir, Myriam ?
— J’aimerais aider les gens au Soudan, en Soudan, spécialement les femmes et les enfants ; j’aimerais promouvoir la liberté de la religion.
— Et à ceux qui vous considèrent comme une héroïne pour les chrétiens ? Que leur dites-vous?
— Je leur dis: merci pour votre soutien et pour vos prières. Mais j’ai toujours besoin de soutien. J’ai besoin de prières. J’ai besoin du soutien des autres.
— Et vous les aurez. Je vous souhaite tout ce qu’il y a de mieux pour vous et votre famille.
— (Avec un radieux sourire.) Merci. Merci beaucoup.
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