Cheyenne-Marie Carron : « Mes films veulent montrer la beauté de l’âme »
Cinéaste, Cheyenne-Marie Carron s’est faîte connaître notamment avec la réalisation de l’Apôtre (2014), ce film iconoclaste qui raconte la conversion d’un jeune musulman à la foi catholique. Mais c’est toute son œuvre qui ne se conforme pas vraiment à la pensée dominante et consensuelle qui stérilise le cinéma français. C’est sans doute une raison de leur succès : ils posent de vraies questions politiques, culturelles, spirituelles. Quelle est la force qui permet à la réalisatrice d’avancer à contre-courant ?
Liberté politique. — Vous êtes réalisatrice de cinéma, quand et comment vous avez fait ce choix de vie ? Pourquoi avoir choisi le cinéma plutôt qu’un autre art ?
À l’âge de seize ans, la DDASS m’a retiré à ma famille d’accueil, j’ai vécu d’abord en foyer, puis seule dans un studio. Je n’allais jamais en cours, et je louais beaucoup de cassettes VHS dans un vidéo-club. Je regardais jusqu’à six films par jour, surtout des films classiques en noir et blanc. C’était mon refuge.
Puis, à mes 18 ans, lorsque j’ai dû choisir un métier, ma seule passion était le cinéma. Alors je suis montée à Paris, sans argent et sans relation, et je me suis battue pour faire mes films…
Quel regard rétrospectif portez-vous sur votre enfance ?
Mon enfance a été un va-et-vient dans le chaos et dans l’amour. Ma mère (adoptive) m’a aimé de manière absolue, et ma génitrice m’a haï de manière absolue dès ma naissance. Petite, j’ai connu des souffrances terribles, mais j’ai aussi rencontré le soutien indéfectible de Dieu à travers le regard de ma mère.
Je dois dire qu’à l’âge de vingt ans, j’avais vu tout ce qu’on peut voir de l’humain. J’avais affronté la mythologie que la vie m’avait réservée et j’étais prête à affronter le monde et imposer mon univers à travers le cinéma.
Où avez-vous trouvé les racines qui vous manquaient ? Comment expliquez-vous la grande fécondité de votre œuvre ?
Être un enfant maltraité et abandonné peut donner une force insoupçonnable. Grâce à cet abandon, tout commençait : il n’y a rien derrière et donc devant moi tout est devenu possible.
Ensuite, grâce à ma famille, j’ai baigné dans une tradition de France profonde dès mon plus jeune âge. Je me souviens qu’enfant, chez mes grands-parents, je dormais dans un vieux lit creusé par les générations.
J’ai eu les deux forces : celle de me sentir libre de tout héritage et celle de choisir l’héritage d’une famille modeste, catholique et française.
Quelle est la réalité la plus fondamentale que vous cherchez à montrer dans vos films ?
La beauté. La beauté de l’âme, la beauté de Dieu, la beauté des hommes.
Pouvez-vous nous raconter l'histoire de votre conversion ?
Ce serait bien trop long. Ma conversion a commencé avec l'amour que ma mère m'a porté. Un amour patient, parfois sacrificiel. Ma mère a été la première personne qui m'a montré le chemin de Dieu. Puis, vers l'âge de sept ans, j'ai rencontré Dieu dans mon cœur. Il m'a beaucoup aidé et soutenu, et m'a permis de m'en sortir dans la vie. Finalement l'histoire de ma conversion s'étale sur de nombreuses années. Dieu est patient.
Y a-t-il un lien entre votre conversion personnelle et la conversion que vous racontez dans L'Apôtre ?
Oui. Deux personnes ont compté dans la vie pour me faire connaître Dieu : ma mère et le prêtre de mon village. Lorsque j'ai eu dix-neuf ans, la sœur de mon prêtre a été tuée par un musulman. Ce prêtre a tendu la main à la famille du tueur. A dix-neuf ans, j'ai assisté à l'immense beauté du geste de ce petit curé de campagne, et cela m'a touché au cœur, j'ai mesuré à quel point rien n'égale la beauté et la grandeur du catholicisme.
Bien des années plus tard, j'ai fait le film L'Apôtre en mémoire de ce prêtre et de sa sœur, et pour que la France entière connaisse ce curé et ne l'oublie jamais.
Propos recueillis par Axel Rokvam.
En savoir plus :
http://www.cheyennecarron.com/index.php
Cinéaste, Cheyenne-Marie Carron s’est faîte connaître notamment avec la réalisation de l’Apôtre (2014), ce film iconoclaste qui raconte la conversion d’un jeune musulman à la foi catholique. Mais c’est toute son œuvre qui ne se conforme pas vraiment à la pensée dominante et consensuelle qui stérilise le cinéma français. C’est sans doute une raison de leur succès : ils posent de vraies questions politiques, culturelles, spirituelles. Quelle est la force qui permet à la réalisatrice d’avancer à contre-courant ?
Liberté politique. — Vous êtes réalisatrice de cinéma, quand et comment vous avez fait ce choix de vie ? Pourquoi avoir choisi le cinéma plutôt qu’un autre art ?
À l’âge de seize ans, la DDASS m’a retiré à ma famille d’accueil, j’ai vécu d’abord en foyer, puis seule dans un studio. Je n’allais jamais en cours, et je louais beaucoup de cassettes VHS dans un vidéo-club. Je regardais jusqu’à six films par jour, surtout des films classiques en noir et blanc. C’était mon refuge.
Puis, à mes 18 ans, lorsque j’ai dû choisir un métier, ma seule passion était le cinéma. Alors je suis montée à Paris, sans argent et sans relation, et je me suis battue pour faire mes films…
Quel regard rétrospectif portez-vous sur votre enfance ?
Mon enfance a été un va-et-vient dans le chaos et dans l’amour. Ma mère (adoptive) m’a aimé de manière absolue, et ma génitrice m’a haï de manière absolue dès ma naissance. Petite, j’ai connu des souffrances terribles, mais j’ai aussi rencontré le soutien indéfectible de Dieu à travers le regard de ma mère.
Je dois dire qu’à l’âge de vingt ans, j’avais vu tout ce qu’on peut voir de l’humain. J’avais affronté la mythologie que la vie m’avait réservée et j’étais prête à affronter le monde et imposer mon univers à travers le cinéma.
Où avez-vous trouvé les racines qui vous manquaient ? Comment expliquez-vous la grande fécondité de votre œuvre ?
Être un enfant maltraité et abandonné peut donner une force insoupçonnable. Grâce à cet abandon, tout commençait : il n’y a rien derrière et donc devant moi tout est devenu possible.
Ensuite, grâce à ma famille, j’ai baigné dans une tradition de France profonde dès mon plus jeune âge. Je me souviens qu’enfant, chez mes grands-parents, je dormais dans un vieux lit creusé par les générations.
J’ai eu les deux forces : celle de me sentir libre de tout héritage et celle de choisir l’héritage d’une famille modeste, catholique et française.
Quelle est la réalité la plus fondamentale que vous cherchez à montrer dans vos films ?
La beauté. La beauté de l’âme, la beauté de Dieu, la beauté des hommes.
Pouvez-vous nous raconter l'histoire de votre conversion ?
Ce serait bien trop long. Ma conversion a commencé avec l'amour que ma mère m'a porté. Un amour patient, parfois sacrificiel. Ma mère a été la première personne qui m'a montré le chemin de Dieu. Puis, vers l'âge de sept ans, j'ai rencontré Dieu dans mon cœur. Il m'a beaucoup aidé et soutenu, et m'a permis de m'en sortir dans la vie. Finalement l'histoire de ma conversion s'étale sur de nombreuses années. Dieu est patient.
Y a-t-il un lien entre votre conversion personnelle et la conversion que vous racontez dans L'Apôtre ?
Oui. Deux personnes ont compté dans la vie pour me faire connaître Dieu : ma mère et le prêtre de mon village. Lorsque j'ai eu dix-neuf ans, la sœur de mon prêtre a été tuée par un musulman. Ce prêtre a tendu la main à la famille du tueur. A dix-neuf ans, j'ai assisté à l'immense beauté du geste de ce petit curé de campagne, et cela m'a touché au cœur, j'ai mesuré à quel point rien n'égale la beauté et la grandeur du catholicisme.
Bien des années plus tard, j'ai fait le film L'Apôtre en mémoire de ce prêtre et de sa sœur, et pour que la France entière connaisse ce curé et ne l'oublie jamais.
Propos recueillis par Axel Rokvam.
En savoir plus :
http://www.cheyennecarron.com/index.php