Pourquoi faire bénir des objets ?
Le Père Franck Javary, curé de la cathédrale de Nanterre, répond aux questions de Sophie de Villeneuve dans l’émission de RND, Mille questions à la foi
de V. : Dans la Bible, la première bénédiction de Dieu est dite sur l’homme et sur la femme. Tout le récit de la création est bénédiction. Et dans le judaïsme, la bénédiction est très fréquente. La liturgie chrétienne a tout naturellement repris ce geste, et nous sommes tous bénis après l’eucharistie et à chaque célébration d’un sacrement.
Pour autant, faut-il tout bénir ? Des médailles, des images, des motos, des maisons ou encore des animaux ? Quand vous recevez de telles demandes de bénédiction, comment y répondez-vous ?
Franck Javary : Positivement, et volontiers, puisque c’est l’Église qui propose que soient bénis des objets dont nous allons nous servir. La première chose à comprendre, bien sûr, c’est que ce n’est pas l’objet qui est béni, mais la personne qui va l’utiliser.
Vous bénissez tout, les chiens, les chats, les voitures ?
J. : L’Église propose un rituel de bénédiction pour des maisons, des instruments de travail, des animaux, des voitures, des avions, des trains, tout cela est prévu pour sanctifier l’activité humaine qui est ainsi accompagnée. Toute réalité humaine peut contribuer à la gloire de Dieu. Mais encore une fois ce n’est pas l’objet qui est béni. Dans le rituel pour la bénédiction d’une voiture par exemple, le prêtre dit : « Nous te prions pour ceux qui se serviront de cette voiture. Qu’ils fassent route en toute sécurité, qu’ils fassent preuve de prudence… » Bénir une voiture, c’est demander au Seigneur d’accompagner la route de ceux qui la conduiront.
Et les animaux alors ?
J. : Ils sont bénis parce qu’ils sont les compagnons de l’homme, et c’est important. On demande au Seigneur qui a créé les êtres humains, mais aussi tout le vivant avec les animaux pour servir notre vie humaine, de bénir ces compagnons, pour qu’ils soient de bons compagnons et que nous soyons de bons maîtres. Pour beaucoup de gens, un animal est vraiment un compagnon de vie, à sa juste place bien sûr, mais on peut souhaiter que ce compagnon soit béni.
Autrefois on bénissait les moissons. On le fait moins aujourd’hui, est-ce dommage ?
J. : C’est une question de culture : notre société est moins rurale qu’autrefois, où l’on demandait au curé de bénir les champs, les semailles, les premiers fruits… C’est toujours prévu. En France, dans une société plus urbaine et moins chrétienne, certaines bénédictions se sont effacées, mais elles peuvent être encore très vivaces dans d’autres pays.
C’est toujours un prêtre qui bénit ?
J. : Pas forcément. Le premier ministre de la bénédiction, c’est l’évêque. C’est lui qui bénit une église, un nouvel autel. La bénédiction fait partie du ministère des prêtres et des diacres. Mais les chrétiens aussi peuvent bénir. Ou bien parce que cela fait partie de leur charge propre : des parents peuvent bénir leur enfant. Ou bien par délégation, par « ministère extraordinaire », si le prêtre délègue pour cela tel ou tel chrétien, et dans ce cas la prière sera dite de manière un peu différente.
La petite croix qu’on peut faire sur le front d’un enfant, c’est une bénédiction ?
J. : C’en est une, et le rituel propose des prières longues ou courtes pour cela. A l’occasion de la rentrée scolaire par exemple, le père ou la mère de famille peut dire cette prière de bénédiction et marquer son enfant du signe de la croix, au moment où l’enfant part à l’école le jour de la rentrée.
Il y a des paroles spécifiques à prononcer ?
J. : Il y a des propositions dans le rituel, mais ce ne sont pas des formules magiques, avec des mots à dire absolument ! Dites : « Seigneur, bénis mon enfant qui va partir en voyage », « Bénis mon enfant qui part à l’école »… On peut dire ensuite un Notre Père ou un Je vous salue Marie, on peut lire un passage de la Bible qui éclaire le sens de cette bénédiction. Même s’il existe des prières précises, un père ou une mère de famille peut bénir le Seigneur et demander que son enfant soit béni avec ses propres mots.
On n’est pas obligé d’employer de l’eau bénite ?
J. : Non, la bénédiction peut être donnée par différents moyens : l’imposition des mains ou le geste de l’aspersion. Fondamentalement, la bénédiction est une prière. Des gestes l’accompagnent pour en donner le sens, mais il n’y a pas là encore de matière particulière qui soit nécessaire.
Peut-on bénir des personnes sans qu’elles le sachent ?
J. : Non, parce que ces personnes que l’on veut bénir doivent accueillir cette bénédiction dans la foi. On demande qu’elles soient présentes. On me demande parfois de bénir un objet que l’on désire offrir à quelqu’un qui n’est pas là. Je demande alors le prénom de la personne, et je propose de prier pour elle.
Peut-on croire qu’un objet béni opère des miracles ?
J. : Non. Dieu seul opère des miracles.
Certains n’osent pas jeter des objets bénis. Avoir un objet béni, est-ce une responsabilité ?
J. : Ces personnes ont raison de marquer du respect pour un objet béni, non pas pour lui-même, mais pour ce dont il est le signe. Il arrive qu’on m’apporte à la cathédrale de Nanterre des objets religieux abîmés ou cassés, que les gens ne veulent pas jeter.
Vous exercez un discernement quand on vous fait une demande ?
J. : Oui, il arrive que l’on refuse une demande qui ne nous paraît pas adaptée. Quand on m’apporte des litres d’eau à bénir, je demande pour quel usage, et il m’arrive de proposer à la personne autre chose que ce qu’elle demande, tout en l’accueillant.
Conseilleriez-vous à des jeunes mariés de faire bénir leur lieu de vie ?
J. : Pendant le temps pascal, nous proposons à tous les paroissiens de venir bénir leur maison. Bénir une maison ne se fait pas en quelques secondes : on écoute la parole de Dieu, on prie ensemble, il y a la prière de bénédiction proprement dite… Cela peut être une liturgie développée, une très belle célébration.
Donc, faire bénir des objets, cela sert à quoi ? Protéger la personne ? Lui donner un peu de l’amour de Dieu ?
J. : Cela sert d’abord à bénir Dieu, à reconnaître qu’il est présent à chaque instant de notre vie et, parce que Dieu me bénit, à réaliser davantage son amour prévenant, qui veut en effet nous protéger du mal. Ce n’est pas magique : ce n’est pas parce qu’une voiture est bénie qu’on peut conduire n’importe comment ! Bien au contraire, on doit d’autant plus avoir une conduite responsable. Manifester l’amour de Dieu, voilà le sens de toute bénédiction. Bien sûr, il y a des déviations possibles. J’ai trouvé sur internet tout un trafic d’objets bénis, et j’ai eu la satisfaction de voir qu’on tient en haute estime la bénédiction d’un prêtre catholique sur des sites absolument pas catholiques ! L’Église n’encourage pas cela, bien au contraire. C’est la relation à Dieu qui sanctifie, l’objet n’est qu’un moyen par lequel est signifiée cette bénédiction de Dieu, qui est pour les personnes qui la demandent dans la foi.
On voit bien dans la Bible que nous sommes bénis dès notre origine. Quel rapport avec le fait de faire bénir un objet ?
J. : Cela rappelle cette bénédiction fondamentale. Nous sommes bénis parce qu’aimés de Dieu, mais nous avons toujours besoin qu’on nous le rappelle, sinon nous ne célébrerions pas dans l’eucharistie le mémorial de la Passion du Seigneur. Notre vie chrétienne est marquée par le rappel et l’actualisation de cet amour de Dieu. Nous sommes bénis par notre conception, notre naissance, et il est bon que cette bénédiction soit redite chaque jour, de différentes manières.
Finalement, c’est bien de faire bénir des objets ?
J. : Oui, il y a un très bon usage de la bénédiction des objets, qui ne doit pas devenir systématique, mais pour que soit manifesté l’amour de Dieu à travers tel objet, dans telle situation. Il ne faut pas hésiter à faire connaître cette possibilité, à faire savoir qu’elle est prévue par l’Église, et à demander à votre prêtre ce qui est possible.
Recueilli par Sophie de Villeneuve 2012
http://radionotredame.net/emission/mille-questions-a-la-foi/26-09-2012/
https://myriamir.wordpress.com/2016/08/30/pourquoi-faire-benir-des-objets/
La bénédiction des maisons..
Coutume remontant au Christ..
Le Père Franck Javary, curé de la cathédrale de Nanterre, répond aux questions de Sophie de Villeneuve dans l’émission de RND, Mille questions à la foi
Le Père Franck Javary, curé de la cathédrale de Nanterre, répond aux questions de Sophie de Villeneuve dans l’émission de RND, Mille questions à la foi
de V. : Dans la Bible, la première bénédiction de Dieu est dite sur l’homme et sur la femme. Tout le récit de la création est bénédiction. Et dans le judaïsme, la bénédiction est très fréquente. La liturgie chrétienne a tout naturellement repris ce geste, et nous sommes tous bénis après l’eucharistie et à chaque célébration d’un sacrement.
Pour autant, faut-il tout bénir ? Des médailles, des images, des motos, des maisons ou encore des animaux ? Quand vous recevez de telles demandes de bénédiction, comment y répondez-vous ?
Franck Javary : Positivement, et volontiers, puisque c’est l’Église qui propose que soient bénis des objets dont nous allons nous servir. La première chose à comprendre, bien sûr, c’est que ce n’est pas l’objet qui est béni, mais la personne qui va l’utiliser.
Vous bénissez tout, les chiens, les chats, les voitures ?
J. : L’Église propose un rituel de bénédiction pour des maisons, des instruments de travail, des animaux, des voitures, des avions, des trains, tout cela est prévu pour sanctifier l’activité humaine qui est ainsi accompagnée. Toute réalité humaine peut contribuer à la gloire de Dieu. Mais encore une fois ce n’est pas l’objet qui est béni. Dans le rituel pour la bénédiction d’une voiture par exemple, le prêtre dit : « Nous te prions pour ceux qui se serviront de cette voiture. Qu’ils fassent route en toute sécurité, qu’ils fassent preuve de prudence… » Bénir une voiture, c’est demander au Seigneur d’accompagner la route de ceux qui la conduiront.
Et les animaux alors ?
J. : Ils sont bénis parce qu’ils sont les compagnons de l’homme, et c’est important. On demande au Seigneur qui a créé les êtres humains, mais aussi tout le vivant avec les animaux pour servir notre vie humaine, de bénir ces compagnons, pour qu’ils soient de bons compagnons et que nous soyons de bons maîtres. Pour beaucoup de gens, un animal est vraiment un compagnon de vie, à sa juste place bien sûr, mais on peut souhaiter que ce compagnon soit béni.
Autrefois on bénissait les moissons. On le fait moins aujourd’hui, est-ce dommage ?
J. : C’est une question de culture : notre société est moins rurale qu’autrefois, où l’on demandait au curé de bénir les champs, les semailles, les premiers fruits… C’est toujours prévu. En France, dans une société plus urbaine et moins chrétienne, certaines bénédictions se sont effacées, mais elles peuvent être encore très vivaces dans d’autres pays.
C’est toujours un prêtre qui bénit ?
J. : Pas forcément. Le premier ministre de la bénédiction, c’est l’évêque. C’est lui qui bénit une église, un nouvel autel. La bénédiction fait partie du ministère des prêtres et des diacres. Mais les chrétiens aussi peuvent bénir. Ou bien parce que cela fait partie de leur charge propre : des parents peuvent bénir leur enfant. Ou bien par délégation, par « ministère extraordinaire », si le prêtre délègue pour cela tel ou tel chrétien, et dans ce cas la prière sera dite de manière un peu différente.
La petite croix qu’on peut faire sur le front d’un enfant, c’est une bénédiction ?
J. : C’en est une, et le rituel propose des prières longues ou courtes pour cela. A l’occasion de la rentrée scolaire par exemple, le père ou la mère de famille peut dire cette prière de bénédiction et marquer son enfant du signe de la croix, au moment où l’enfant part à l’école le jour de la rentrée.
Il y a des paroles spécifiques à prononcer ?
J. : Il y a des propositions dans le rituel, mais ce ne sont pas des formules magiques, avec des mots à dire absolument ! Dites : « Seigneur, bénis mon enfant qui va partir en voyage », « Bénis mon enfant qui part à l’école »… On peut dire ensuite un Notre Père ou un Je vous salue Marie, on peut lire un passage de la Bible qui éclaire le sens de cette bénédiction. Même s’il existe des prières précises, un père ou une mère de famille peut bénir le Seigneur et demander que son enfant soit béni avec ses propres mots.
On n’est pas obligé d’employer de l’eau bénite ?
J. : Non, la bénédiction peut être donnée par différents moyens : l’imposition des mains ou le geste de l’aspersion. Fondamentalement, la bénédiction est une prière. Des gestes l’accompagnent pour en donner le sens, mais il n’y a pas là encore de matière particulière qui soit nécessaire.
Peut-on bénir des personnes sans qu’elles le sachent ?
J. : Non, parce que ces personnes que l’on veut bénir doivent accueillir cette bénédiction dans la foi. On demande qu’elles soient présentes. On me demande parfois de bénir un objet que l’on désire offrir à quelqu’un qui n’est pas là. Je demande alors le prénom de la personne, et je propose de prier pour elle.
Peut-on croire qu’un objet béni opère des miracles ?
J. : Non. Dieu seul opère des miracles.
Certains n’osent pas jeter des objets bénis. Avoir un objet béni, est-ce une responsabilité ?
J. : Ces personnes ont raison de marquer du respect pour un objet béni, non pas pour lui-même, mais pour ce dont il est le signe. Il arrive qu’on m’apporte à la cathédrale de Nanterre des objets religieux abîmés ou cassés, que les gens ne veulent pas jeter.
Vous exercez un discernement quand on vous fait une demande ?
J. : Oui, il arrive que l’on refuse une demande qui ne nous paraît pas adaptée. Quand on m’apporte des litres d’eau à bénir, je demande pour quel usage, et il m’arrive de proposer à la personne autre chose que ce qu’elle demande, tout en l’accueillant.
Conseilleriez-vous à des jeunes mariés de faire bénir leur lieu de vie ?
J. : Pendant le temps pascal, nous proposons à tous les paroissiens de venir bénir leur maison. Bénir une maison ne se fait pas en quelques secondes : on écoute la parole de Dieu, on prie ensemble, il y a la prière de bénédiction proprement dite… Cela peut être une liturgie développée, une très belle célébration.
Donc, faire bénir des objets, cela sert à quoi ? Protéger la personne ? Lui donner un peu de l’amour de Dieu ?
J. : Cela sert d’abord à bénir Dieu, à reconnaître qu’il est présent à chaque instant de notre vie et, parce que Dieu me bénit, à réaliser davantage son amour prévenant, qui veut en effet nous protéger du mal. Ce n’est pas magique : ce n’est pas parce qu’une voiture est bénie qu’on peut conduire n’importe comment ! Bien au contraire, on doit d’autant plus avoir une conduite responsable. Manifester l’amour de Dieu, voilà le sens de toute bénédiction. Bien sûr, il y a des déviations possibles. J’ai trouvé sur internet tout un trafic d’objets bénis, et j’ai eu la satisfaction de voir qu’on tient en haute estime la bénédiction d’un prêtre catholique sur des sites absolument pas catholiques ! L’Église n’encourage pas cela, bien au contraire. C’est la relation à Dieu qui sanctifie, l’objet n’est qu’un moyen par lequel est signifiée cette bénédiction de Dieu, qui est pour les personnes qui la demandent dans la foi.
On voit bien dans la Bible que nous sommes bénis dès notre origine. Quel rapport avec le fait de faire bénir un objet ?
J. : Cela rappelle cette bénédiction fondamentale. Nous sommes bénis parce qu’aimés de Dieu, mais nous avons toujours besoin qu’on nous le rappelle, sinon nous ne célébrerions pas dans l’eucharistie le mémorial de la Passion du Seigneur. Notre vie chrétienne est marquée par le rappel et l’actualisation de cet amour de Dieu. Nous sommes bénis par notre conception, notre naissance, et il est bon que cette bénédiction soit redite chaque jour, de différentes manières.
Finalement, c’est bien de faire bénir des objets ?
J. : Oui, il y a un très bon usage de la bénédiction des objets, qui ne doit pas devenir systématique, mais pour que soit manifesté l’amour de Dieu à travers tel objet, dans telle situation. Il ne faut pas hésiter à faire connaître cette possibilité, à faire savoir qu’elle est prévue par l’Église, et à demander à votre prêtre ce qui est possible.
Recueilli par Sophie de Villeneuve 2012
http://radionotredame.net/emission/mille-questions-a-la-foi/26-09-2012/
https://myriamir.wordpress.com/2016/08/30/pourquoi-faire-benir-des-objets/