lundi 20 mars 2017
Meals on Wheels menacé : Trump s'en prend aux "petits vieux"
De toutes les coupes budgétaires à la hache proposées par Donald Trump, ce sont celles qui menacent un programme de repas à domicile pour les personnes âgées qui ont le plus choqué.
Le dernier succès de Donald Trump, un hit incontesté, est un programme aux antipodes du bling-bling et des dorures kitsch qu'il affectionne : un programme de repas à domicile pour les petits vieux désargentés. Seul problème : c'est un succès malgré lui...
Jusqu'à jeudi dernier, Meals on Wheels ("repas sur roues") était l'un de ces programmes d'aide sociale dont tout le monde pense du bien, mais à qui l'on oublie parfois de donner – populaire mais pas glamour. Dans tout le pays, les volontaires de Meals on Wheels livrent 219 millions de repas chaque année à 2,4 millions d'Américains de plus de 60 ans, trop vieux, pauvres ou frêles pour sortir de chez eux. La majorité de ces personnes âgées vivent seules, et cette livraison de repas est souvent leur seul contact avec le monde extérieur.
"Meals on Wheels, cela sonne bien"
Qui serait contre un tel programme ? Donald Trump ! Son budget, présenté jeudi, taille à la hache dans une multitude de programmes domestiques, afin de financer une augmentation des dépenses militaires et de sécurité nationale. Parmi les coupes proposées, un programme fédéral obscur, les Community Developement Block Grants (CDBGs), qui donne des fonds aux Etats pour des projets locaux – dont Meals on Wheels. Une ville californienne comme San José, par exemple, reçoit 2,5 millions de dollars de ces fonds qu'elle consacre à l'aide aux SDF, aux programmes de lutte contre l'illettrisme, aux travaux à domicile pour les plus pauvres... Et, pour plus de 100.000 dollars, à Meals on Wheels.
Le programme est donc clairement menacé. Et d'un seul coup, c'est tout le pays qui redécouvre son attachement à cette variante yankee de nos Restos du cœur : jeudi, après l'annonce du budget proposé par Trump, le montant des dons quotidiens à Meals on Wheels a été multiplié par 50, tandis que les inscriptions de volontaires étaient cinq fois supérieures à la normale. Et au Congrès, les Démocrates et même certains Républicains promettent déjà de se mettre en travers des rails et de sauver les petits vieux !
Une erreur, donc ? Pas le moins du monde. Mike Mulvaney, le directeur du Budget, défend mordicus les coupes proposées :
"Nous n'allons pas dépenser de l'argent dans des programmes qui ne peuvent pas prouver qu'il ont tenu les promesses que nous avons faites au peuple américain (…). Le gouvernement ne peut pas dépenser de l'argent dans des programmes simplement parce que leur nom sonne bien à l'oreille – Meals on Wheels, cela sonne très bien à l'oreille."
L'accusation est d'une rare stupidité, concernant un programme qui permet d'économiser des milliards de dollars d'argent public. Il permet à des millions de seniors (dont 500.000 anciens combattants) de rester à domicile, alors que le coût d'une année de repas à domicile est équivalent à celui d'une seule journée d'hospitalisation.
Et en nourrissant correctement les seniors, il réduit très nettement le nombre de chutes à domicile et donc d'hospitalisations - ces accidents coûtent 31 milliards de dollars à Medicare, l'assurance-maladie des personnes âgées. En 2010, Meals on Wheels a lancé un partenariat avec des hôpitaux locaux, ciblant les seniors après leur hospitalisation ; leur taux de réadmission à l'hôpital a chuté à 6%, contre une moyenne nationale de 17 à 20%.
Des coupes sauvages
Le sort promis à Meals on Wheels par l'administration Trump n'a rien d'accidentel : la réforme de l'assurance-maladie, qui risque de réduire de 24 millions le nombre de personnes couvertes, a été la première salve contre les pauvres, le budget constitue la seconde.
Mais les coupes dans les programmes fédéraux bénéficiant aux plus défavorisés sont tellement sauvages que, même dans un Etat ayant massivement voté Trump comme la Virginie occidentale, l'inquiétude monte à vue d'œil. A preuve la "une", vendredi dernier, du "Charleston Gazette-Mail", le principal quotidien de cet Etat rural et minier pauvre : "Le budget de Trump assomme la Virginie occidentale".
Voilà, pour reprendre les mots du directeur du Budget, un titre qui ne "sonne pas bien à l'oreille"…
par Philippe Boulet-Gercourt
Meals on Wheels menacé : Trump s'en prend aux "petits vieux"
De toutes les coupes budgétaires à la hache proposées par Donald Trump, ce sont celles qui menacent un programme de repas à domicile pour les personnes âgées qui ont le plus choqué.
Le dernier succès de Donald Trump, un hit incontesté, est un programme aux antipodes du bling-bling et des dorures kitsch qu'il affectionne : un programme de repas à domicile pour les petits vieux désargentés. Seul problème : c'est un succès malgré lui...
Jusqu'à jeudi dernier, Meals on Wheels ("repas sur roues") était l'un de ces programmes d'aide sociale dont tout le monde pense du bien, mais à qui l'on oublie parfois de donner – populaire mais pas glamour. Dans tout le pays, les volontaires de Meals on Wheels livrent 219 millions de repas chaque année à 2,4 millions d'Américains de plus de 60 ans, trop vieux, pauvres ou frêles pour sortir de chez eux. La majorité de ces personnes âgées vivent seules, et cette livraison de repas est souvent leur seul contact avec le monde extérieur.
"Meals on Wheels, cela sonne bien"
Qui serait contre un tel programme ? Donald Trump ! Son budget, présenté jeudi, taille à la hache dans une multitude de programmes domestiques, afin de financer une augmentation des dépenses militaires et de sécurité nationale. Parmi les coupes proposées, un programme fédéral obscur, les Community Developement Block Grants (CDBGs), qui donne des fonds aux Etats pour des projets locaux – dont Meals on Wheels. Une ville californienne comme San José, par exemple, reçoit 2,5 millions de dollars de ces fonds qu'elle consacre à l'aide aux SDF, aux programmes de lutte contre l'illettrisme, aux travaux à domicile pour les plus pauvres... Et, pour plus de 100.000 dollars, à Meals on Wheels.
Le programme est donc clairement menacé. Et d'un seul coup, c'est tout le pays qui redécouvre son attachement à cette variante yankee de nos Restos du cœur : jeudi, après l'annonce du budget proposé par Trump, le montant des dons quotidiens à Meals on Wheels a été multiplié par 50, tandis que les inscriptions de volontaires étaient cinq fois supérieures à la normale. Et au Congrès, les Démocrates et même certains Républicains promettent déjà de se mettre en travers des rails et de sauver les petits vieux !
Une erreur, donc ? Pas le moins du monde. Mike Mulvaney, le directeur du Budget, défend mordicus les coupes proposées :
"Nous n'allons pas dépenser de l'argent dans des programmes qui ne peuvent pas prouver qu'il ont tenu les promesses que nous avons faites au peuple américain (…). Le gouvernement ne peut pas dépenser de l'argent dans des programmes simplement parce que leur nom sonne bien à l'oreille – Meals on Wheels, cela sonne très bien à l'oreille."
L'accusation est d'une rare stupidité, concernant un programme qui permet d'économiser des milliards de dollars d'argent public. Il permet à des millions de seniors (dont 500.000 anciens combattants) de rester à domicile, alors que le coût d'une année de repas à domicile est équivalent à celui d'une seule journée d'hospitalisation.
Et en nourrissant correctement les seniors, il réduit très nettement le nombre de chutes à domicile et donc d'hospitalisations - ces accidents coûtent 31 milliards de dollars à Medicare, l'assurance-maladie des personnes âgées. En 2010, Meals on Wheels a lancé un partenariat avec des hôpitaux locaux, ciblant les seniors après leur hospitalisation ; leur taux de réadmission à l'hôpital a chuté à 6%, contre une moyenne nationale de 17 à 20%.
Des coupes sauvages
Le sort promis à Meals on Wheels par l'administration Trump n'a rien d'accidentel : la réforme de l'assurance-maladie, qui risque de réduire de 24 millions le nombre de personnes couvertes, a été la première salve contre les pauvres, le budget constitue la seconde.
Mais les coupes dans les programmes fédéraux bénéficiant aux plus défavorisés sont tellement sauvages que, même dans un Etat ayant massivement voté Trump comme la Virginie occidentale, l'inquiétude monte à vue d'œil. A preuve la "une", vendredi dernier, du "Charleston Gazette-Mail", le principal quotidien de cet Etat rural et minier pauvre : "Le budget de Trump assomme la Virginie occidentale".
Voilà, pour reprendre les mots du directeur du Budget, un titre qui ne "sonne pas bien à l'oreille"…
par Philippe Boulet-Gercourt