L'image de sérieux, voire d'austérité, que peuvent renvoyer les chrétiens est doublement regrettable. Elle fait fuir et elle est contraire à la joie de l’Évangile.
Le constat n'est pas nouveau. Le christianisme reste largement associé au refus du plaisir. Porter sa croix sur terre pour espérer des lendemains qui chantent dans l'au-delà ne saurait autoriser les réjouissances et le rire.
On me rétorquera qu'il s'agit là de caricatures. On me renverra, peut-être, aux JMJ, aux rassemblements de Taizé...
Il n'en est pas moins vrai que les chrétiens, sous nos latitudes, ne respirent pas tous, loin s'en faut la joie de vivre.
Ce n'est sans doute pas par hasard si le premier grand texte du pape François s'intitule La joie de l'Évangile. Cliquer ici
Un "petit rappel" à tous ceux, nombreux, qui l'ont oublié ou, peut-être, jamais su.
Cette image doloriste, à laquelle on peut sans peine associer le puritanisme, le pessimisme, la culpabilité, le poids des interdits, l'ennui... colle au catholicisme comme le sparadrap au capitaine Haddock.
Ceux qui vivent leur foi à l'intérieur de l’Église ne souscriront pas tous à cette appréciation - Dieu merci !
En revanche, cette image rebute tous ceux qui sont à l'extérieur, indifférents ou hostiles au christianisme.
Comment prétendre évangéliser, c'est-à-dire partager une bonne nouvelle, si l'on n'est pas, soi-même, heureux de cette bonne nouvelle ?
Car le message du Christ est bonne nouvelle et, en cela, aux antipodes de la triste image qui est perçue dans les sociétés occidentales.
Autrement dit et je vais citer la philosophe Laurence Devillairs dont (l'excellent) article paru dans le dernier numéro d’Études (1) a inspiré les remarques précédents.
"Il faudrait pouvoir pratiquer les choses sérieuses de la foi avec l'intelligence de la plaisanterie. L'humour en spiritualité est un garde-fou contre le puritanisme, cet esprit de sérieux consistant à tout prendre au pied de la lettre au détriment de l'esprit.
"Il faut croire et en rire, non pas par désinvolture, mais au contraire par conviction, celle que l'on a de ne pas être à la hauteur de ce que l'on croit, de ne pas être le garant du contenu de sa foi.
"C'est là une autre façon de désigner la grâce, qui fait certes advenir en nous le meilleur, mais au bout de nos forces, par le seul recours de Dieu.
"C'est pourquoi elle gracie et ne récompense pas.
"Dieu donne ce qu'il demande.
"Loin de nous accabler, cette vérité devrait pouvoir nous faire sourire."
1 : Le christianisme n'est pas un puritanisme, Études n° 4023 mars 2014.