Jeudi, 11 juillet 2019
La seule personne qui compte, c'est moi !
Seau d’eau souillée balancé du troisième étage, qui tombe sur la tête d’une élégante dame. Quartier réveillé au petit matin par un voisin qui a décidé de commencer ses rénos à l’heure des poules. Meubles et détritus largués sur le trottoir après des déménagements. Les derniers jours m’ont offert de pathétiques exemples de manque de civilité. Comment inoculer une bonne dose de savoir-vivre à ceux et celles à qui il en manque ?
La scène est totalement surréaliste. Détestablement surréaliste, devrais-je dire.
Jeudi 17 h 45, coin des rues Cartier et Crémazie à Québec. Une intersection achalandée où marchent de très nombreux piétons, particulièrement en cette fin de journée chaude où on a l’impression de pouvoir enfin profiter de l’été.
Mon fils de 4 ans et demi roule sur le trottoir en trottinette alors que maman court derrière avec le lunch en vue d’un petit pique-nique sur les plaines.
Arrivée au coin de la rue, je lève les yeux vers l’immeuble qui se trouve devant moi. Ce que je vois est, pour moi, tellement improbable que, sur le coup, j’arrive mal à décoder ce qui se passe. Je reste figée à observer la scène.
Un homme dans la quarantaine verse un seau d’eau brune du balcon du troisième étage, directement sur le trottoir. Une dame élégante passe malheureusement par là au même moment et reçoit cette douche insalubre par la tête.
À cette heure, à cet endroit, il est évident qu’il y a des piétons sur le trottoir...
Nous sommes quelques-uns à être allés voir la femme arrosée pour s’enquérir de son état.
Si, bien évidemment, l’eau ne lui avait causé aucune blessure, elle avait « mal » d’être victime d’un si déplorable manque de savoir-vivre.
De ses vêtements se dégageait désormais une sordide odeur d’eau de Javel mélangée avec un je-ne-sais-quoi d’aussi nauséabond.
La police
En racontant cette désolante tranche de vie en société sur ma page Facebook, certains, aussi outrés que moi, m’ont mentionné que, si ça leur était arrivé, ils auraient fait appel à la police : la seule façon de donner une leçon de civilité à de pareils individus sans classe ni égard aux autres.
Vérification faite, si la dame avait effectivement téléphoné au 9-1-1, des agents seraient fort possiblement intervenus pour identifier le grossier personnage et lui donner un constat d’infraction, en vertu des règlements municipaux concernant les nuisances sur le domaine public. Mais rien de criminel n’a été commis.
«Si l’intention était clairement malveillante, il serait possible de considérer le geste comme des voies de fait, mais de l’eau versée d’un balcon, c’est davantage de l’ordre du règlement municipal», explique David Poitras de la police de Québec.
Pire qu’avant ?
Y’a-t-il moins de savoir-vivre et de politesse maintenant que par le passé ?
Je ne saurais le dire. Il faudrait une étude comparative sérieuse pour avancer qu’auparavant, les citoyens avaient davantage de manières et de raffinement dans leurs relations aux autres qu’aujourd’hui.
Je sais toutefois que les derniers jours m’ont malheureusement donné de multiples exemples navrants qui m’amènent à me demander pourquoi certains et certaines semblent avoir si peu de considération pour ceux et celles qui les entourent ?
La scie circulaire à 7 h le samedi matin
Au centre-ville de Québec, nous vivons collés les uns sur les autres. Ce choix de vie urbain implique que nous acceptons cette proximité, tout comme le fait d’être aidés ou parfois dérangés par nos voisins.
Respectueusement dérangés. Elle est là la nuance.
7 h, samedi matin, un bruit tonitruant de scie circulaire se fait entendre.
Un tout nouveau voisin (ça commence plutôt mal les rapports) refait ses planchers avant d’emménager. Et c’est à cette heure, lors d’une journée où la plupart des gens sont en congé, qu’il a décidé que les travaux commençaient.
En pyjama, les cheveux ébouriffés, encore endormie, mais bien calme et contenue, je vais informer l’homme, qui vit à quelques mètres à peine de ma maison, que toute ma famille est désormais réveillée.
D’autres voisins le sont aussi.
«J’ai le droit!»
C’est l’entrepreneur qui me reçoit, avec autant de rudesse que j’avais essayé de mettre de douceur dans mon intervention.
«Il est 7 h, j’ai le droit!», me balance-t-il sans le moindre malaise.
Effectivement, à partir de 7 h, même la fin de semaine, il est dans son bon droit de faire du bruit, selon le règlement municipal.
Mais en sommes-nous à réduire le vivre-ensemble à une question légaliste ?
Vous avez certes le « droit » d’aller porter vos vieux sous-vêtements souillés dans des friperies ou des centres de dons. Vous ne serez pas arrêté pour cette raison, mais est-ce respectueux ?
La civilité, elle ? Cette façon d’être qui tient en considération ceux et celles qui nous entourent n’est-elle pas essentielle pour le bien-être de tous ?
Poser la question, c’est y répondre. Mais visiblement certains n’ont de sollicitude que pour eux-mêmes !
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]par Karina Marceau