Pape François : « Laisser ses parents âgés sans visite pendant huit mois, cela s’appelle un péché mortel ! »
ELISABETH DE BAUDOÜIN (414)
04.03.2015
« Laisser ses parents âgés sans visite pendant huit mois, cela s’appelle un péché mortel ! » Comme chacun sait, le Pape ne plaisante pas avec la « culture du rejet ». Surtout quand elle s’attaque aux plus vulnérables, en particulier les personnes âgées. Mais ce mercredi
4 mars 2015, face aux fidèles rassemblés place Saint-Pierre, François a haussé le ton d’un cran, pour dénoncer la « condition problématique actuelle des personnes âgées », objet de cette nouvelle catéchèse sur la famille. La prochaine fois, a-t-il annoncé au passage, il traitera à nouveau du grand âge, mais en positif cette fois : il s’agira de réfléchir à « la vocation contenue dans cet âge de la vie ».
À la clef de ce long plaidoyer, figurent un souvenir personnel et une anecdote. Le premier concerne les visites que Jorge Mario Bergoglio faisait dans les maisons de retraite quand il était en Argentine, et qui donnaient lieu à cet échange : « Comment allez-vous ? Et vos enfants ? Combien en avez-vous ? C’est beaucoup ! Et viennent-ils vous rendre visite ? Oui, oui, ils viennent, ils viennent souvent ! Ah, et quand sont-ils venus la dernière fois ? »... Un jour, une vielle dame répond au futur Pape que la dernière visite remonte à Noël… « Alors que nous étions en août », se scandalise François, avant d’ajouter : « Huit mois sans recevoir de visite de ses enfants ! Huit mois abandonnée ! Cela s’appelle un péché mortel, vous entendez ? ».
L’anecdote, elle, lui vient de sa grand-mère. Nonna Rosa (qui comme on le sait occupe une grande place dans le cœur de son petit-fils) avait raconté l’histoire d’un vieillard, qui se salissait quand il mangeait sa soupe, car il n’arrivait plus à porter la cuillère à sa bouche. Pour éviter de faire mauvais effet quand il y avait des invités à table, le père de famille avait décidé de le faire déjeuner tout seul à la cuisine, sur une petite table. Un jour, poursuit le Pape, cet homme rentre à la maison et trouve son fils avec du bois, un marteau et des clous, en train de fabriquer une petite table. « C’est pour que tu puisses manger dessus quand tu seras vieux », explique l’enfant à son père. Et le Pape de conclure : « Les enfants ont plus de conscience que nous ».
« Grâce aux progrès de la médecine, la vie s’est allongée, mais la société ne s’est pas "élargie" à la vie, constate le Pape. Le nombre des personnes âgées s’est multiplié, mais nos sociétés ne se sont pas suffisamment organisées pour leur faire une place, avec un juste respect et de la considération concrète pour leur fragilité et leur dignité. Tant que nous sommes jeunes, nous sommes conduits à ignorer la vieillesse, comme si c’était une maladie, une maladie dont il faut se tenir éloigné. Mais quand nous devenons âgés, spécialement si nous sommes pauvres, malades, seuls, nous faisons l’expérience des lacunes d’une société basée sur l’efficacité et qui donc ignore les personnes âgées (qu’elle voit comme un poids, un fardeau, parce qu’elles ne produisent rien, à la différence des jeunes, qui sont utiles et peuvent donc jouir,ajoutera-t-il plus tard) ».
À ce propos, François cite les paroles « claires et prophétiques » de son prédécesseur, visitant une maison de retraite (12 novembre 2012) : « La qualité d’une société, ou plutôt d’une civilisation, se juge à la façon dont sont traitées les personnes âgées et à la place qui leur est réservée dans la vie commune ». C’est vrai, commente François, « l’attention aux "anciens" fait la différence entre les civilisations. Une civilisation où l’on prend soin des personnes âgées, où on leur fait une place, a de l’avenir, parce qu’elle sait respecter la sagesse, la sagesse des anciens. Une civilisation où il n’y a pas de place pour les personnes âgées, où elles sont écartées parce qu’elles posent problème, porte en elle le virus de la mort ».
Péché mortel, laideur, lâcheté, perversité, mort…
Place Saint-Pierre, le Pape n’a pas eu de mot assez fort pour condamner les sociétés qui écartent les personnes âgées.
ELISABETH DE BAUDOÜIN (414)
04.03.2015
© Sabrina Fusco / ALETEIA
« Laisser ses parents âgés sans visite pendant huit mois, cela s’appelle un péché mortel ! » Comme chacun sait, le Pape ne plaisante pas avec la « culture du rejet ». Surtout quand elle s’attaque aux plus vulnérables, en particulier les personnes âgées. Mais ce mercredi
4 mars 2015, face aux fidèles rassemblés place Saint-Pierre, François a haussé le ton d’un cran, pour dénoncer la « condition problématique actuelle des personnes âgées », objet de cette nouvelle catéchèse sur la famille. La prochaine fois, a-t-il annoncé au passage, il traitera à nouveau du grand âge, mais en positif cette fois : il s’agira de réfléchir à « la vocation contenue dans cet âge de la vie ».
Un souvenir et une anecdote
À la clef de ce long plaidoyer, figurent un souvenir personnel et une anecdote. Le premier concerne les visites que Jorge Mario Bergoglio faisait dans les maisons de retraite quand il était en Argentine, et qui donnaient lieu à cet échange : « Comment allez-vous ? Et vos enfants ? Combien en avez-vous ? C’est beaucoup ! Et viennent-ils vous rendre visite ? Oui, oui, ils viennent, ils viennent souvent ! Ah, et quand sont-ils venus la dernière fois ? »... Un jour, une vielle dame répond au futur Pape que la dernière visite remonte à Noël… « Alors que nous étions en août », se scandalise François, avant d’ajouter : « Huit mois sans recevoir de visite de ses enfants ! Huit mois abandonnée ! Cela s’appelle un péché mortel, vous entendez ? ».
L’histoire du vieillard qu’on faisait manger à part, pour ne pas choquer
L’anecdote, elle, lui vient de sa grand-mère. Nonna Rosa (qui comme on le sait occupe une grande place dans le cœur de son petit-fils) avait raconté l’histoire d’un vieillard, qui se salissait quand il mangeait sa soupe, car il n’arrivait plus à porter la cuillère à sa bouche. Pour éviter de faire mauvais effet quand il y avait des invités à table, le père de famille avait décidé de le faire déjeuner tout seul à la cuisine, sur une petite table. Un jour, poursuit le Pape, cet homme rentre à la maison et trouve son fils avec du bois, un marteau et des clous, en train de fabriquer une petite table. « C’est pour que tu puisses manger dessus quand tu seras vieux », explique l’enfant à son père. Et le Pape de conclure : « Les enfants ont plus de conscience que nous ».
Le constat d’une société qui rejette les « vieux »
« Grâce aux progrès de la médecine, la vie s’est allongée, mais la société ne s’est pas "élargie" à la vie, constate le Pape. Le nombre des personnes âgées s’est multiplié, mais nos sociétés ne se sont pas suffisamment organisées pour leur faire une place, avec un juste respect et de la considération concrète pour leur fragilité et leur dignité. Tant que nous sommes jeunes, nous sommes conduits à ignorer la vieillesse, comme si c’était une maladie, une maladie dont il faut se tenir éloigné. Mais quand nous devenons âgés, spécialement si nous sommes pauvres, malades, seuls, nous faisons l’expérience des lacunes d’une société basée sur l’efficacité et qui donc ignore les personnes âgées (qu’elle voit comme un poids, un fardeau, parce qu’elles ne produisent rien, à la différence des jeunes, qui sont utiles et peuvent donc jouir,ajoutera-t-il plus tard) ».
On juge une société à la façon dont elle traite ses anciens
À ce propos, François cite les paroles « claires et prophétiques » de son prédécesseur, visitant une maison de retraite (12 novembre 2012) : « La qualité d’une société, ou plutôt d’une civilisation, se juge à la façon dont sont traitées les personnes âgées et à la place qui leur est réservée dans la vie commune ». C’est vrai, commente François, « l’attention aux "anciens" fait la différence entre les civilisations. Une civilisation où l’on prend soin des personnes âgées, où on leur fait une place, a de l’avenir, parce qu’elle sait respecter la sagesse, la sagesse des anciens. Une civilisation où il n’y a pas de place pour les personnes âgées, où elles sont écartées parce qu’elles posent problème, porte en elle le virus de la mort ».