ENTRETIEN AVEC MGR MARC AILLET
Alors que s’est ouvert à Rome le synode sur l’Église, Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, rappelle que seule une profonde réforme intérieure, avec pour cap la sainteté, peut venir à bout des crises qui secouent l’institution.
Ordinations d’hommes mariés, place des femmes dans l’Église... Quel constat tirez- vous des discussions qui s’engagent à Rome pendant ce synode ?
Mgr Marc Aillet: La crise de l’Église s’inscrit dans une crise du sacerdoce qui découle d’une crise de la foi.
Comme nous ne savons plus ce qu’est l’Église, elle devient une ONG, elle ne suscite donc plus de vocations et ses membres sont tentés de s’adapter aux évolutions du monde.
Le synode est placé sous le signe de l’Esprit Saint et le pape François a dit que le moment le plus attendu était la prière.
Je suis donc confiant quant à son déroulement, mais je suis plus circonspect sur ce qui relève de la préparation de ce rendez-vous ecclésial.
Les synthèses remontées de tous les continents ne sont pas représentatives du peuple chrétien.
En France, ceux qui veulent une réforme et portent un certain nombre de revendications plus ou moins contestables et qui sont les mêmes depuis plus de quarante ans, représentent à peine 10 % des catholiques de notre pays et sont plutôt âgés.
À mon sens, les forces vives de l’Église d’aujourd’hui, en particulier les jeunes, ne se sont pas vraiment senties concernées par la préparation de ce synode.
Rappelons tout de même que son thème est : « Pour une Église synodale : communion, participation et mission. » Qui dit mission dit annonce de l’Évangile au monde et depuis le concile tous les papes rappellent cette ambition.
Pour Jean-Paul II, l’Église était « un mystère de communion missionnaire ».
Or les thèmes mis sur la table lors de ce synode évoquent beaucoup de questions structurelles ou organisationnelles.
À force de ressasser les revendications sur la question du célibat des prêtres qui serait intenable, sur la morale sexuelle qui serait rétrograde, sur la place des femmes qui seraient méprisées, on finirait par remettre en cause les
fondements même de la foi.
La nouvelle évangélisation lancée depuis le concile n’apparaît pas.
Ce synode ne serait-il qu’un instrument de travail pour montrer que l’Église doit s’adapter au monde de notre temps ? Je ne l’espère pas.
Que pensez-vous de la déclaration du pape François sur la bénédiction d’unions homo-sexuelles, perçues comme une autorisation par la presse ?
Dans sa réponse aux dubia de quelques cardinaux, le pape François est très clair pour rappeler que le mariage est exclusivement l’union stable d’un homme et d’une femme ouverts à la vie et que toute bénédiction d’un couple homosexuel devra être évitée pour ne pas entretenir de confusion avec le mariage proprement dit.
Il ajoute toutefois, en étendant son propos de manière plus générale à toutes sortes de situations, que la charité pastorale peut, moyennant un discernement face à des cas concrets qui ne peuvent être compris dans une norme absolue, permettre de bénir une ou plusieurs personnes, même si leur comportement contrevient objectivement à la morale, en considération de circonstances atténuantes.
Sa réponse ne porte pas sur les actes homosexuels en eux-mêmes, dont on sait que le Magistère les considère comme «intrinsèquement désordonnés » (Catéchisme de l’Église catholique n. 2357).
On peut donc se demander si la bénédiction de couples homosexuels, même dans certains cas, au nom de la charité pastorale, ne risque pas de
prêter à confusion sur la moralité des actes homosexuels?
Sinon qu’en est-il des « actes intrinsèquement mauvais » qui appartiennent à l’enseignement constant de l’Église, rappelé solennellement par Jean-Paul II dans l’encyclique Veritatis splendor ?
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Nous avons perdu le sens du péché en perdant le sens de la révélation que Dieu fait de lui-même à travers l’incarnation du Christ.
L’homme de nos jours pense qu’il n’a plus besoin de Salut.
Or, Jésus est venu dans le monde car l’homme s’est détourné de Dieu par le péché. Il est venu sauver l’homme blessé dans sa relation avec Dieu et avec
les autres hommes.
On ne peut pas parler de Jésus, de Dieu, de l’Église sans parler du Salut !
De nos jours, nous avons du mal à parler du péché et même de la croix, sous prétexte que cela traumatise les gens !
Il est de bon ton de parler d’une façon consensuelle de la beauté de la création. Elle est belle bien sûr mais ce n’est pas pour autant que le monde est bon.
Il est blessé par le péché.
Dieu veut sauver tous les hommes mais il les appelle à la conversion car il ne les sauve pas sans eux.
Dans la perspective du Salut, quelle définition donneriez-vous de l’Église ?
L’Église, avant d’être une institution à administrer et à réformer est un mystère, un sacrement.
Qu’est-ce que cela signifie ? Le mot mysterion souligne dans la tradition grecque, reprise dans la liturgie orientale, les réalités cachées en Dieu.
Dans la tradition latine, on lui préfère le mot sacramentum qui évoque davantage la manifestation visible des réalités invisibles.
L’Église est tout à la fois un mystère, une réalité cachée en Dieu de toute éternité et un sacrement, c’est à dire une réalité visible qui dévoile et communique les réalités invisibles.
L’Église est l’union du divin et de l’humain : elle procède du Christ, Verbe fait chair, Dieu fait homme.
L’Église c’est Dieu qui habite dans le cœur des hommes, reliés les uns aux autres pour faire un peuple qui lui appartient, le peuple de Dieu qu’il s’est acquis par le sang de son Fils.
N’oublions jamais que l’Église n’est pas d’abord une institution humaine mais qu’elle est voulue par Dieu pour nous faire entrer dans sa Vie.
En tant que pasteur, que prônez-vous à chacun pour redonner de l’Espérance ?
J’ai écrit Le temps des saints pour rappeler des exigences de foi au moment où il est de bon ton de profiter de la crise de l’Église pour démolir la légitimité de son enseignement moral et la vérité du sacerdoce.
Nous ne pouvons réformer l’Église sans prendre conscience de son mystère !
Cependant, cela implique de notre part une conversion intérieure basée sur une exigence de sainteté.
Qu’est-ce qu’être saint ? Être saint c’est appartenir à Dieu, donc être relié à Dieu par tout ce que nous sommes.
Les membres de l’Église ne sont pas d’abord des citoyens mais des personnes incorporées au Christ par la grâce du baptême.
Nous devons donc tous avoir conscience de notre vocation à la sainteté.
C’est selon moi la clef de la vie de l’Église et de sa réforme qui passe par notre réforme intérieure.
Sommes-nous capables de voir au-delà des dysfonctionnements structurels la profondeur de l’enseignement de l’Église ?
Savons-nous vraiment écouter l’Évangile et en vivre ?
Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle !
Voilà ce que Jésus nous demande.
Concrètement, comment revivifier l’Église de l’intérieur?
Il n’y a pas d’Église sans prêtre et tous sont concernés par l’exigence de sainteté.
Comment être un saint prêtre?
Comment être cohérent avec la mission confiée ?
Le prêtre est mis à part mais pas séparé des fidèles. Il doit toujours penser à se convertir en marchant comme pasteur au milieu de son troupeau.
La crise du sacerdoce est une crise de la transmission, car l’Église a été marquée par l’idéologie contestataire des années 1960-1970.
La crise du clergé est une crise de la vie spirituelle des prêtres trop délaissée au profit d’un activisme pastoral, voire d’un engagement social ou politique.
Quand on refuse un héritage ou qu’on ne sait plus comment l’accueillir, qu’a-t-on à transmettre?
Il faut donc revenir à une pastorale de l’engendrement avec des prêtres qui aient conscience de la dimension paternelle qu’ils incarnent en témoignant de la foi reçue pour la transmettre.
Pour revivifier l’Église de l’intérieur il faut aussi donner aux séminaristes une formation sur la liturgie qui demeure le sommet et la source de la vie et de la mission de l’Église !
En ce sens, elle n’est pas un en-soi séparé du reste de notre vie : étant la célébration du Mystère pascal du Christ, elle nous aide toujours plus à passer concrètement, dans l’ordinaire de notre existence, de la mort à la vie : une vie de charité ici-bas dans l’espérance de la vie éternelle.
Enfin, je crois que l’Église connaît de nouveau une période que je qualifierais de néo-païenne.
Les laïcs ont un rôle important à jouer. Dans mon diocèse j’ai initié un parcours dit « Cleophas » pour former des disciples missionnaires.
La première année est un temps de formation, mais tout est centré sur la rencontre avec le Christ.
La deuxième année est consacrée à la mission. Une cinquantaine de fidèles participent, à chaque promotion, à cette aventure placée sous le signe de l’Esprit Saint car je peux témoigner qu’elle donne de très beaux fruits.
L’avenir de l’Église passe par la formation d’esprits éclairés de laïcs rendant témoignage à la vérité et de prêtres formés pour notre temps, cohérents dans leur vie et leur ministère.
L’Église a du mal à être audible y compris sur les sujets sociétaux où l’on attendrait des paroles fortes. Que faire ?
Je dois reconnaître que certains pasteurs ne sont plus là pour protéger leurs troupeaux mais pour faire bonne figure devant le monde.
Or le monde, et le monde politique en particulier, n’a de cesse de nous endormir en prônant le dialogue.
Mais que ressort-il de ce dialogue qui n’en est jamais un ? Rien !
Nous, les évêques, apparaissons comme une composante parmi d’autres du corps social.
Nous disons les choses de façon consensuelle comme si nous apportions une opinion parmi d’autres mais c’est la Vérité que nous devons porter à l’exemple d’un saint Jean Baptiste.
Notre mission est difficile, les gens ont perdu tout repère chrétien, donc nous devons parler fort et s’il le faut de façon un peu rude.
Je me dis que l’essentiel est de toucher la conscience des personnes, y compris et surtout celles qui sont éloignées de l’Église.
Nous n’aurons pas une masse de supporters, nous susciterons des hostilités, mais nous réveillerons quelques âmes.
À la manière des prophètes, cela induit souvent d’accepter la solitude.
A toutes les époques, peu nombreux ont été les pasteurs courageux en périodes de crise.
Pendant l’occupation allemande, cinq évêques sur la centaine de l’époque ont condamné publiquement la
rafle des juifs, dont l’évêque de Bayonne Mgr Vansteenberghe.
Beaucoup plus tôt dans l’histoire de l’Église, lors de la crise de l’arianisme, l’immense majorité des évêques étaient devenus ariens, à l’exception de quelques-uns parmi lesquels Hilaire de Poitiers ou Rémy de Reims.
N’oublions pas leur fécondité née de la foi en l’Évangile qui n’est pas négociable. :diamonds:
Propos recueillis par Véronique Jacquier
http://www.seraphim-marc-elie.fr/2023/10/nous-avons-perdu-le-sens-du-peche.html?utm_source=_ob_email&utm_medium=_ob_notification&utm_campaign=_ob_pushmail
Alors que s’est ouvert à Rome le synode sur l’Église, Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, rappelle que seule une profonde réforme intérieure, avec pour cap la sainteté, peut venir à bout des crises qui secouent l’institution.
Ordinations d’hommes mariés, place des femmes dans l’Église... Quel constat tirez- vous des discussions qui s’engagent à Rome pendant ce synode ?
Mgr Marc Aillet: La crise de l’Église s’inscrit dans une crise du sacerdoce qui découle d’une crise de la foi.
Comme nous ne savons plus ce qu’est l’Église, elle devient une ONG, elle ne suscite donc plus de vocations et ses membres sont tentés de s’adapter aux évolutions du monde.
Le synode est placé sous le signe de l’Esprit Saint et le pape François a dit que le moment le plus attendu était la prière.
Je suis donc confiant quant à son déroulement, mais je suis plus circonspect sur ce qui relève de la préparation de ce rendez-vous ecclésial.
Les synthèses remontées de tous les continents ne sont pas représentatives du peuple chrétien.
En France, ceux qui veulent une réforme et portent un certain nombre de revendications plus ou moins contestables et qui sont les mêmes depuis plus de quarante ans, représentent à peine 10 % des catholiques de notre pays et sont plutôt âgés.
À mon sens, les forces vives de l’Église d’aujourd’hui, en particulier les jeunes, ne se sont pas vraiment senties concernées par la préparation de ce synode.
Rappelons tout de même que son thème est : « Pour une Église synodale : communion, participation et mission. » Qui dit mission dit annonce de l’Évangile au monde et depuis le concile tous les papes rappellent cette ambition.
Pour Jean-Paul II, l’Église était « un mystère de communion missionnaire ».
Or les thèmes mis sur la table lors de ce synode évoquent beaucoup de questions structurelles ou organisationnelles.
À force de ressasser les revendications sur la question du célibat des prêtres qui serait intenable, sur la morale sexuelle qui serait rétrograde, sur la place des femmes qui seraient méprisées, on finirait par remettre en cause les
fondements même de la foi.
La nouvelle évangélisation lancée depuis le concile n’apparaît pas.
Ce synode ne serait-il qu’un instrument de travail pour montrer que l’Église doit s’adapter au monde de notre temps ? Je ne l’espère pas.
Que pensez-vous de la déclaration du pape François sur la bénédiction d’unions homo-sexuelles, perçues comme une autorisation par la presse ?
Dans sa réponse aux dubia de quelques cardinaux, le pape François est très clair pour rappeler que le mariage est exclusivement l’union stable d’un homme et d’une femme ouverts à la vie et que toute bénédiction d’un couple homosexuel devra être évitée pour ne pas entretenir de confusion avec le mariage proprement dit.
Il ajoute toutefois, en étendant son propos de manière plus générale à toutes sortes de situations, que la charité pastorale peut, moyennant un discernement face à des cas concrets qui ne peuvent être compris dans une norme absolue, permettre de bénir une ou plusieurs personnes, même si leur comportement contrevient objectivement à la morale, en considération de circonstances atténuantes.
Sa réponse ne porte pas sur les actes homosexuels en eux-mêmes, dont on sait que le Magistère les considère comme «intrinsèquement désordonnés » (Catéchisme de l’Église catholique n. 2357).
On peut donc se demander si la bénédiction de couples homosexuels, même dans certains cas, au nom de la charité pastorale, ne risque pas de
prêter à confusion sur la moralité des actes homosexuels?
Sinon qu’en est-il des « actes intrinsèquement mauvais » qui appartiennent à l’enseignement constant de l’Église, rappelé solennellement par Jean-Paul II dans l’encyclique Veritatis splendor ?
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Nous avons perdu le sens du péché en perdant le sens de la révélation que Dieu fait de lui-même à travers l’incarnation du Christ.
L’homme de nos jours pense qu’il n’a plus besoin de Salut.
Or, Jésus est venu dans le monde car l’homme s’est détourné de Dieu par le péché. Il est venu sauver l’homme blessé dans sa relation avec Dieu et avec
les autres hommes.
On ne peut pas parler de Jésus, de Dieu, de l’Église sans parler du Salut !
De nos jours, nous avons du mal à parler du péché et même de la croix, sous prétexte que cela traumatise les gens !
Il est de bon ton de parler d’une façon consensuelle de la beauté de la création. Elle est belle bien sûr mais ce n’est pas pour autant que le monde est bon.
Il est blessé par le péché.
Dieu veut sauver tous les hommes mais il les appelle à la conversion car il ne les sauve pas sans eux.
Dans la perspective du Salut, quelle définition donneriez-vous de l’Église ?
L’Église, avant d’être une institution à administrer et à réformer est un mystère, un sacrement.
Qu’est-ce que cela signifie ? Le mot mysterion souligne dans la tradition grecque, reprise dans la liturgie orientale, les réalités cachées en Dieu.
Dans la tradition latine, on lui préfère le mot sacramentum qui évoque davantage la manifestation visible des réalités invisibles.
L’Église est tout à la fois un mystère, une réalité cachée en Dieu de toute éternité et un sacrement, c’est à dire une réalité visible qui dévoile et communique les réalités invisibles.
L’Église est l’union du divin et de l’humain : elle procède du Christ, Verbe fait chair, Dieu fait homme.
L’Église c’est Dieu qui habite dans le cœur des hommes, reliés les uns aux autres pour faire un peuple qui lui appartient, le peuple de Dieu qu’il s’est acquis par le sang de son Fils.
N’oublions jamais que l’Église n’est pas d’abord une institution humaine mais qu’elle est voulue par Dieu pour nous faire entrer dans sa Vie.
En tant que pasteur, que prônez-vous à chacun pour redonner de l’Espérance ?
J’ai écrit Le temps des saints pour rappeler des exigences de foi au moment où il est de bon ton de profiter de la crise de l’Église pour démolir la légitimité de son enseignement moral et la vérité du sacerdoce.
Nous ne pouvons réformer l’Église sans prendre conscience de son mystère !
Cependant, cela implique de notre part une conversion intérieure basée sur une exigence de sainteté.
Qu’est-ce qu’être saint ? Être saint c’est appartenir à Dieu, donc être relié à Dieu par tout ce que nous sommes.
Les membres de l’Église ne sont pas d’abord des citoyens mais des personnes incorporées au Christ par la grâce du baptême.
Nous devons donc tous avoir conscience de notre vocation à la sainteté.
C’est selon moi la clef de la vie de l’Église et de sa réforme qui passe par notre réforme intérieure.
Sommes-nous capables de voir au-delà des dysfonctionnements structurels la profondeur de l’enseignement de l’Église ?
Savons-nous vraiment écouter l’Évangile et en vivre ?
Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle !
Voilà ce que Jésus nous demande.
Concrètement, comment revivifier l’Église de l’intérieur?
Il n’y a pas d’Église sans prêtre et tous sont concernés par l’exigence de sainteté.
Comment être un saint prêtre?
Comment être cohérent avec la mission confiée ?
Le prêtre est mis à part mais pas séparé des fidèles. Il doit toujours penser à se convertir en marchant comme pasteur au milieu de son troupeau.
La crise du sacerdoce est une crise de la transmission, car l’Église a été marquée par l’idéologie contestataire des années 1960-1970.
La crise du clergé est une crise de la vie spirituelle des prêtres trop délaissée au profit d’un activisme pastoral, voire d’un engagement social ou politique.
Quand on refuse un héritage ou qu’on ne sait plus comment l’accueillir, qu’a-t-on à transmettre?
Il faut donc revenir à une pastorale de l’engendrement avec des prêtres qui aient conscience de la dimension paternelle qu’ils incarnent en témoignant de la foi reçue pour la transmettre.
Pour revivifier l’Église de l’intérieur il faut aussi donner aux séminaristes une formation sur la liturgie qui demeure le sommet et la source de la vie et de la mission de l’Église !
En ce sens, elle n’est pas un en-soi séparé du reste de notre vie : étant la célébration du Mystère pascal du Christ, elle nous aide toujours plus à passer concrètement, dans l’ordinaire de notre existence, de la mort à la vie : une vie de charité ici-bas dans l’espérance de la vie éternelle.
Enfin, je crois que l’Église connaît de nouveau une période que je qualifierais de néo-païenne.
Les laïcs ont un rôle important à jouer. Dans mon diocèse j’ai initié un parcours dit « Cleophas » pour former des disciples missionnaires.
La première année est un temps de formation, mais tout est centré sur la rencontre avec le Christ.
La deuxième année est consacrée à la mission. Une cinquantaine de fidèles participent, à chaque promotion, à cette aventure placée sous le signe de l’Esprit Saint car je peux témoigner qu’elle donne de très beaux fruits.
L’avenir de l’Église passe par la formation d’esprits éclairés de laïcs rendant témoignage à la vérité et de prêtres formés pour notre temps, cohérents dans leur vie et leur ministère.
L’Église a du mal à être audible y compris sur les sujets sociétaux où l’on attendrait des paroles fortes. Que faire ?
Je dois reconnaître que certains pasteurs ne sont plus là pour protéger leurs troupeaux mais pour faire bonne figure devant le monde.
Or le monde, et le monde politique en particulier, n’a de cesse de nous endormir en prônant le dialogue.
Mais que ressort-il de ce dialogue qui n’en est jamais un ? Rien !
Nous, les évêques, apparaissons comme une composante parmi d’autres du corps social.
Nous disons les choses de façon consensuelle comme si nous apportions une opinion parmi d’autres mais c’est la Vérité que nous devons porter à l’exemple d’un saint Jean Baptiste.
Notre mission est difficile, les gens ont perdu tout repère chrétien, donc nous devons parler fort et s’il le faut de façon un peu rude.
Je me dis que l’essentiel est de toucher la conscience des personnes, y compris et surtout celles qui sont éloignées de l’Église.
Nous n’aurons pas une masse de supporters, nous susciterons des hostilités, mais nous réveillerons quelques âmes.
À la manière des prophètes, cela induit souvent d’accepter la solitude.
A toutes les époques, peu nombreux ont été les pasteurs courageux en périodes de crise.
Pendant l’occupation allemande, cinq évêques sur la centaine de l’époque ont condamné publiquement la
rafle des juifs, dont l’évêque de Bayonne Mgr Vansteenberghe.
Beaucoup plus tôt dans l’histoire de l’Église, lors de la crise de l’arianisme, l’immense majorité des évêques étaient devenus ariens, à l’exception de quelques-uns parmi lesquels Hilaire de Poitiers ou Rémy de Reims.
N’oublions pas leur fécondité née de la foi en l’Évangile qui n’est pas négociable. :diamonds:
Propos recueillis par Véronique Jacquier
http://www.seraphim-marc-elie.fr/2023/10/nous-avons-perdu-le-sens-du-peche.html?utm_source=_ob_email&utm_medium=_ob_notification&utm_campaign=_ob_pushmail